On pouvait espérer que les Parlements et Gouvernements issus des
dernières élections régionales allaient mener une
autre politique et s’inscrire en rupture avec les pratiques
détestables de l’État fédéral.
Il n’en est malheureusement rien, au contraire même,
puisque la politisation des fonctions publiques régionales et
communautaire culmine à des niveaux jamais atteints,
particulièrement à l’occasion de
l’introduction des mandats en Région wallonne et en
Communauté française. On assiste donc à un
véritable verrouillage des administrations, essentiellement au
profit du P.S.
Il s’impose maintenant de faire l’état des lieux et
de remettre sur le métier les options que le GERFA défend
inlassablement pour les services publics en général et
dans ce cas pour les services publics des entités
fédérées.
Certes, le GERFA ne limite pas son examen au seul statut du personnel.
Il porte également sa réflexion sur le fonctionnement du
service public et des institutions fédérées.
Dans cette optique, le GERFA peut apporter sa capacité
d’analyse des causes structurelles des
« dysfonctionnements » constatés, ainsi
que des propositions précises et concrètes permettant des
réformes de fond.
Fort de l’indépendance matérielle et morale de son
organisation et de la compétence collective de ses membres
présents dans tous les secteurs du service public, le GERFA
n’exclut à priori aucun domaine de la vie publique de ses
préoccupations, à condition que les positions à
prendre soient fondées sur un examen sérieux
sanctionné par un débat démocratique.
Trois options de base guident son action :
- Il faut mettre un terme à la politisation partisane des
services publics (ministères, parastataux et
pararégionaux, services communaux, enseignement, magistrature,
services de police, A.S.B.L. subsidiées, etc.) au moyen de:
— réformes des carrières mettant en pratique les
principes simples que le GERFA a élaborés avec ses
membres répartis dans tous les services publics ;
— création d’Écoles d’administration, de magistrature, etc.
- Les remèdes aux maux dont souffre le service public ne
résident pas dans la privatisation, mais dans sa volonté
des se réformer lui-même. Le service public doit viser
cette forme supérieure de rentabilité qu'est
l'efficacité sociale. II peut certes apprendre du secteur
privé, mais n'a pas de leçon à en recevoir.
- Pluralisme n'égale pas neutralité. L'État et
les services publics sont aujourd'hui, à juste titre,
critiqués de toutes parts. On leur reproche leurs structures
archaïques, leur gestion déficiente et leur politique
budgétaire.
Les agents des services publics eux-mêmes ne sont pas
épargnés : leur « image de marque »
auprès du citoyen est défavorable. On met en cause non
seulement le cout qu’ils représentent pour la
collectivité face aux services qu’ils lui rendent, mais
encore l’inertie, l’irresponsabilité ambiante, la
pénalisation de l’initiative et le cancer
proliférant du clientélisme partisan.
Pour le GERFA, ces critiques souvent justifiées trouvent leur
origine, non dans la paresse ou l’incompétence
supposée de tel ou tel agent, mais dans des structures confiant
quasiment tous les leviers de décision à des personnes
sélectionnées selon leur allégeance à tel
ou tel pilier, parti, syndicat, homme politique local, président
de parti, etc., indépendamment du principe
d’égalité de tous les citoyens devant les emplois
publics (article 10 de la Constitution), et des plus
élémentaires vérifications de
compétences, ainsi que dans des réformes
bureaucratiques et complexes qui empêchent un fonctionnement
efficace des structures administratives et qui entrainent une
suradministration inutile, voire parasitaire et le recours à de
multiples consultants privés voulant imprimer au service public
une culture et un fonctionnement inadéquats.
Déjà en 1981, lorsqu’il s’était
constitué autour de quelques fonctionnaires de ministères
et parastataux, le GERFA était conscient de ce malaise et
souhaitait y remédier.
Il s’adresse à présent aux agents des services
publics de toutes catégories et de tous niveaux, en ce compris
le personnel de l’enseignement, des communes, de l’ordre
judiciaire, des forces de police, et ambitionne un rôle de
mouvement politique — dans la mesure où il aspire
à un meilleur gouvernement de la
Cité — qui se veut pluraliste, dans sa
composition comme dans ses pratiques.
Le GERFA ne se contente pas de critiquer, mais s’efforce de
faire des propositions constructives, pratiques, qui deviendront
réalistes lorsqu’un large mouvement de citoyens,
relayé par leurs représentants politiques, s’en
emparera et exigera une réforme de fond, bien pensée,
appliquée avec rigueur.
Depuis un demi-siècle, le clientélisme partisan, qui
confie à des structures privées, intégrées
aux partis et aux syndicats traditionnels, la gestion de la chose
publique ainsi que des emplois qu’elle procure, n’a fait
que se développer et se professionnaliser, suscitant la
création et le développement parasitaire d’un
ensemble de structures occultes — mais dont
l’existence est connue de tous — parallèle aux
organes et procédures officiels dans cesse contournés et
biaisés.
Une association de quelques milliers de membres et sympathisants, aussi
capable soit-elle, ne peut prétendre renverser un tel
système à elle seule, surtout si elle prétend se
placer dans le cadre d’un système démocratique
1. Le Gouvernement
Le moins que nous puissions constater, c’est que le bilan de la
Communauté française n’est guère positif. La
législature a en effet très mal commencé, puisque
la coalition socialiste-humaniste a constitué un gouvernement
pléthorique — sept ministres ! —,
doté d’une dizaine de cabinets représentant un
effectif de plus de cinq cents personnes. Le cout des cabinets de la
Communauté a atteint le chiffre de 30 millions sur une base
annuelle et de 150 millions d’euros pour l’ensemble de la
législature, à quoi il faut ajouter les
intérêts, puisque la Communauté est en
déficit, et toutes les dépenses plus ou moins
camouflées dans les budgets de l’administration, ce qui
fait une ardoise minimale de 200 millions d’euros. Tout ça
pour l’entretien de structures parasitaires qui doublent
l’administration, renforcent le lotissement et lui servent de
relais.
Le GERFA tient néanmoins à saluer une évolution
positive qui doit être pérennisée : le
gouvernement de la Communauté française, matrice de la
future fédération Wallonie-Bruxelles, est composé
majoritairement de ministres régionaux. Pour renforcer la
communauté de destin entre la Wallonie et Bruxelles et la
synergie des politiques, le GERFA préconise que le dispositif
suivant soit dorénavant de règle :
— le ministre-président de la Région wallonne
dirige le gouvernement de la Communauté française ;
— la vice-présidence est assurée par un ministre régional bruxellois ;
— les compétences stratégiques et
transversales (finances, fonction publique, relations internationales,
recherche scientifique, formation professionnelle/emploi) sont
exercées par le même ministre à la Région
wallonne et à la Communauté française sans recours
à des cabinets supplémentaires.
2. L’administration
2.1. Les mandats
En 2002, le ministre socialiste DEMOTTE a lancé à grand
bruit une réforme de la haute administration, en
déclarant aux médias médusés que,
désormais, les fonctions de direction seront
conférées par mandat et que la désignation des
mandataires s’effectuera sur une base strictement objective,
puisque les candidats-mandataires devront obtenir préalablement
un brevet de management, décerné après une
période de formation et des examens particulièrement
sélectifs.
DEMOTTE a menti sur toute la ligne : les fonctionnaires
généraux en place ont été
réputés détenir le fameux brevet, la plupart
d’entre eux ont été revêtus d’un
premier mandat et pour les quelques mandats finalement
déclarés vacants, la possession du brevet n’est pas
requise... puisque la procédure de leur attribution a
été suspendue... Les fonctionnaires
généraux primomandatés n’ont pas perdu au
change, puisqu’une prime confortable leur a été
versée, prix de
l’« objectivité » de leur
nomination et de leur assujettissement à leur parti.
Après cette opération, on peut affirmer que le
lotissement de l’administration de la Communauté
française a été véritablement
institutionnalisé et verrouillé pour une bonne vingtaine
d’années, à tel point que l’on se demande si
elle peut encore garantir les intérêts et les droits de
l’ensemble des citoyens qui ne coïncident pas
nécessairement, cela va sans dire, avec ceux des appareils
socialiste et libéral et de leurs affidés.
Mais l’opération de « brevetage »,
même dans sa version allégée, n’a pas
été menée à bien à la suite de
difficultés juridiques et administratives.
La désignation des mandataires a donc été remise
sur le métier et la Communauté française a
décidé d’en confier la sélection à
SELOR, sur la base d’examens ponctuels. Pour faire bref, les
candidats sont invités à passer une épreuve
écrite sur la fonction et un entretien au terme duquel SELOR
établit une liste de candidats transmise au Gouvernement qui
choisit le mandataire.
Cette sélection lapidaire ne nous semble guère efficace,
car il est extrêmement difficile de sélectionner les chefs
d’administration sur la base de deux examens réduits. Par
ailleurs, le Gouvernement n’est pas obligé de nommer et il
ne s’en prive d’ailleurs pas. Si la liste des candidats ne
lui convient pas, il fait recommencer la procédure
jusqu’à ce que le candidat souhaité apparaisse. Le
résultat est d’ailleurs clair puisque le nombre de
candidats se réduit de plus en plus, tellement les dés
paraissent pipés.
Ce système, outre le fait qu’il est hypocrite,
n’atteint pas ses objectifs, à savoir la sélection
objective de chefs d’administration compétents.
2.2. L’Aide à la Jeunesse
Dans le dossier de l’Aide à la jeunesse, la
Communauté française a franchi un pas
supplémentaire dans le lotissement, puisque son parlement a
voté à l’unanimité de ses membres
présents un décret permettant à des agents
contractuels politisés de cette administration, exerçant
les fonctions de directeur, conseiller, conseiller adjoint et directeur
adjoint, et à eux seuls, de poser leur candidature à leur
poste en vue d’une nomination définitive. De
mémoire du GERFA, jamais un tel cynisme, un tel mépris de
l’État de droit et du principe
d’égalité n’avaient été
atteints pour nommer des agents dont la nomination avait
déjà été annulée par le Conseil
d’État en 1994.
Heureusement, par son arrêt n° 96/2005 du 1er juin 2005, la
Cour constitutionnelle a annulé le décret du 19 novembre
2003 et les nominations contestées ont été
retirées. Il n’empêche que les agents engagés
en ’90, annulés en ’94 et renommés sur la
base du décret sont toujours en fonction sous le régime
du contrat et que l’un d’eux, Liliane BAUDART, a
été nommée par mandat directrice
générale de l’Aide à la Jeunesse !
2.3. Le plan API
Le plan stratégique API « Agissons, Progressons,
Innovons ensemble », lancé par le nouveau
secrétaire général -parachuté de la
direction de l’Institut Emile Vandervelde à la tête
de la Communauté française !-, ne convainc pas. Sa
première étape consiste en effet à recruter une
cinquantaine de contractuels, comme si l’administration de la
Communauté française et ses multiples cabinets ne
disposent pas d’assez de personnel. Ce plan API ne
s’inscrit donc pas dans une administration renouvelée,
mais renforce au contraire les mauvaises habitudes d’une
administration politisée qui recourt systématiquement aux
contrats.
1. Le Gouvernement
La Région n’a guère rompu avec sa tradition de
gouvernements pléthoriques puisque pas moins de huit ministres
(neuf lors de la constitution) ont présidé à sa
destinée, épaulés par plus de 600 membres de
cabinet ! Cette inflation de personnel politique et de cabinets
non seulement coute très cher au contribuable wallon (150
à 200 millions d’euros sur l’ensemble de la
législature), mais grippe le fonctionnement de
l’administration dont la productivité s’en ressent
fortement.
2. L’administration
2.1. Les contractuels
La Région wallonne a pratiquement doublé ses effectifs en
douze ans sans que les services au citoyen wallon et à la
collectivité n’aient augmenté en proportion. Pire,
cette augmentation d’effectifs a surtout pris la forme de
recrutements massifs de contractuels, pour la plupart politisés
et devant leur emploi à un quelconque baron du régime.
Certes la Région avait organisé les examens mammouth pour
tenter de mettre fin au régime des contractuels et surtout pour
les régulariser, mais le processus enclenché fut
extrêmement lent et très protecteur des droits mal acquis
des contractuels. De plus, le choix opéré par le
gouvernement précédent n’était surement pas
le meilleur au niveau de l’efficacité administrative :
encore une fois, le recrutement de fonctionnaires pour une
période de vingt à quarante ans doit être une
entreprise soignée et précise en fonction des besoins des
services et non une sorte de travail à la chaine où les
épreuves de sélection s’apparentent de près
ou de loin au « trivial poursuit » !
Lors de la réforme de mars 2009, la Région a franchi un
nouveau pas en constituant, pour ses milliers de contractuels, un
début de carrière pécuniaire ; cette nouvelle
initiative ne réduira pas la masse des contractuels et pourrait
même contribuer à l’augmenter.
2.2. Les mandats
La désignation des mandataires a été remise sur le
métier et la Région wallonne a décidé
d’en confier la sélection à SELOR, sur la base
d’examens ponctuels. Pour faire bref, les candidats sont
invités à passer une épreuve écrite sur la
fonction et un entretien au terme duquel SELOR établit une liste
de candidats transmise au Gouvernement qui choisit le mandataire.
Cette sélection lapidaire ne nous semble guère efficace,
car il est extrêmement difficile de sélectionner les chefs
d’administration sur la base de deux examens ponctuels. Par
ailleurs, le Gouvernement n’est pas obligé de nommer et il
ne s’en prive d’ailleurs pas. Le résultat est
d’ailleurs clair puisque le nombre de candidats se réduit
de plus en plus, tellement les dés paraissent pipés.
Ce système, outre le fait qu’il est hypocrite,
n’atteint pas ses objectifs, à savoir la sélection
objective de chefs d’administration compétents.
Comme à la Communauté française, la politisation
de la Haute fonction publique wallonne a pris des proportions
incroyables ; avec près de 80% de postes attribués,
le P.S. exerce une mainmise quasi totale sur l’administration
wallonne.
2.3. Le code modifié
Le code de 2003 n’innovait guère, à
l’exception notable des mandats, et pouvait dès lors
s’apparenter à une sorte de coordination ; on peut
d’ailleurs s’étonner qu’il ait fallu tant de
temps pour le sortir. Il n’empêche que la réunion
d’une série de textes épars était a priori
positive et permettait une meilleure appréhension du statut du
personnel wallon. Même si le code n’est guère
novateur, il ne s’engageait pas dans les chemins farfelus de la
réforme COPERNIC à l’État
fédéral ou encore dans les bricolages de la
Communauté française. C’était donc un texte
sérieux. En ce sens, donc, le bilan n’était pas
négatif.
Par contre, la réforme de 2009 est particulièrement malheureuse à un triple point de vue.
D’abord, elle complique à l’envi les
procédures de promotion en instaurant pas moins de trois examens
pour l’accession aux emplois d’encadrement (D1, C1, B1,
A5) ; ensuite, elle remet en question le droit légitime,
acquis sur la base d’examen sérieux, des agents D2, C2 et
B2 pour l’accession au grade supérieur ; enfin, elle
instaure une carrière administrative et pécuniaire pour
les contractuels. De plus, on peut considérer que la
réforme de 2009 s’inspire largement de la réforme
COPERNIC sous l’influence de consultants privés qui lui
sont acquis et à un moment ou la réforme COPERNIC se
révèle un échec cuisant à l’Etat
fédéral.
Alors que le statut du personnel de la Région wallonne
s’était inscrit jusqu’en 2003 dans une conception
classique, la nouvelle mouture du code rompt avec le passé et
produit un énorme système bureaucratique de formation, de
sélection, etc.
La simplification de l’administration wallonne est donc remise
à plus tard, le temps de dresser un bilan sur la mauvaise
réforme.
2.4. Le S.P.W.
De nouveau, la Région wallonne a copié l’Etat
fédéral en adoptant l’appellation Service public de
Wallonie pour désigner ses deux ministères.
Au delà de ce sigle qui ne signifie rien ou en tout cas qui
n’apporte aucune plus-value, on doit déplorer la fusion
contre nature des deux ministères (le M.R.W. et le MET) qui
assument des missions distinctes.
Ce n’est pas la direction qu’il fallait prendre. Au
contraire, si les compétences de la Région se renforcent,
il fallait se diriger vers la création de nouveaux
ministères centrés sur les compétences
précises tout en allégeant cependant les structures de
direction.
2.5. Les machins
Pendant cette législature, le Gouvernement wallon et le
Parlement n’ont pas été inactifs et ils ont fait
montre d’une créativité sans borne dans la
création de machins de tous genres (Commissariat
général au Tourisme après la Société
wallonne de crédit social, le Commissariat à la
simplification administrative, la cellule audit pour les fonds
européens, sous la législature précédente),
véritables réceptacles pour caser les amis, les
camarades, ceux qui ont rendu des services, ceux qui ne peuvent plus en
rendre. bref tout un monde parasitaire et clientéliste auquel
les élus du peuple servent des rentes à vie avec les
revenus de la collectivité. Cette pratique, ancrée dans
le monde francophone, est inadmissible, altère
considérablement l’image de la Région et rompt la
relation de confiance et d’estime entre le citoyen et les
institutions.
1. Un Parlement pléthorique
Dès 2004, le nombre de députés bruxellois a
été augmenté de 14 unités et porté
en conséquence à 89 unités et la
répartition entre Francophones et Flamands a été
figée à 72 pour les premiers et à 17 pour les
seconds ! Cette décision, forcée par les partis
flamands, est doublement contestable. D’abord, le parlement
bruxellois comptait déjà suffisamment de membres (le
même nombre dans une région d’un million
d’habitants que dans la Région wallonne qui en compte
trois millions trois cent mille, soit un rapport de un à plus de
TROIS !) pour assurer la représentation correcte de la
population bruxelloise dans ses deux composantes linguistiques,
d’autant que la multiplication de mandats
— très bien payés — est
supportée in fine par les habitants qui n’en demandaient
pas tant et d’autant que le parlement bruxellois ne fait
guère preuve d’une activité débordante
Par ailleurs, le clichage du nombre de représentants flamands et
francophones est une véritable gifle au système
démocratique et au principe du suffrage universel (un homme, une
voix) puisque, quels que soient le nombre de suffrages exprimés
pour les candidats francophones et néerlandophones par
l’ensemble des électeurs de la région bruxelloise,
le nombre des mandataires est invariablement fixé respectivement
à 72 et à 17 ! Il n’y aurait plus que 1000
Néerlandophones à Bruxelles qu’ils seraient
toujours représentés par 17 députés sur
89 ! La minorité flamande de Bruxelles, qui est surement la
minorité la mieux protégée du monde, n’avait
pas besoin de ce nouveau privilège exorbitant et contraire au
principe d’égalité pour assurer sa survie !
D'autres mauvaises réformes ne peuvent être exclues,
d’autant que la situation financière de la région
n’a pas été réglée structurellement
et implique de constantes négociations financières qui
sont toujours payées en termes d’avancées (pour les
uns) ou de reculs (pour les autres) institutionnels. Enfin,
n’oublions pas que les mécanismes de décision de la
Région restent extrêmement lourds, puisque la loi
spéciale lui impose cinq ministres et trois secrétaires
d’État avec leurs cabinets respectifs, ainsi que la
parité linguistique au niveau des ministres, le président
excepté, sans parler de la multiplication des assemblées
et exécutifs (les commissions communautaires) et des doubles
majorités.
A cet égard, la proposition du Groupe Wallonie-bruxelles visant
à supprimer la Commission communautaire commune et à
transférer ses compétences à la Région est
un pas dans la bonne direction qu’il convient de saluer.
2. L’emploi des langues et le cout du bilinguisme
Au niveau de l’emploi des langues dans
l’administration, la situation reste préoccupante. Certes
et contrairement aux communes bruxelloises, ce sont les principes
applicables aux administrations centrales de l’État qui
ont prévalu, soit l’unilinguisme des agents et le
bilinguisme des services ; pour déterminer
l’importance des cadres linguistiques, il fallait donc
évaluer le volume des affaires traitées respectivement en
français et en néerlandais et procéder au comptage
des dossiers ; alors que d’un premier comptage et
d’une première analyse, on pouvait conclure que la
répartition se ferait à raison de 85% pour les dossiers F
et 15% pour les dossiers N, le gouvernement bruxellois a conclu un
accord politique et a fixé les cadres à raison de 70%
pour le cadre français et 30% pour le cadre néerlandais
en faisant l’impasse sur la règle imposant le comptage des
affaires.
Dans plusieurs secteurs importants ((Administration, Service
d’incendie et d’aide médiale urgente), le Conseil
d’Etat a annulé les cadres linguistiques, obligeant la
Région bruxelloise à remettre son évaluation sur
le métier. On peut espérer cette fois que la
répartition linguistique se fera sur la base d’une
évaluation sérieuse du volume des affaires
traitées respectivement en français et en
néerlandais. Plus fondamentalement, le GERFA remet en cause les
règles de la parité au niveau des emplois de direction,
qui ne s’impose plus dans une Région à 90%
francophone et qui constitue un privilège indu pour les agents
du rôle linguistique néerlandais qui profitent d’un
avantage de carrière disproportionné.
Il faut donc pour les emplois de direction adopter les mêmes
règles que pour les autres emplois et établir la
proportion entre F et N sur la base du volume des affaires. Cette
demande implique évidemment une modification de la loi
fédérale. Pour faire bref, la Région bruxelloise
doit s’affranchir d’un bilinguisme lourd et qui ne
correspond plus aux besoins de sa population.
3. L’accès à la fonction publique
Sous l’impulsion du secrétaire d’État
à la Fonction publique, le socialiste flamand DELATHOUWER, le
parlement avait voté une ordonnance permettant
l’accès à la fonction publique bruxelloise aux
étrangers non européens ou plus précisément
indépendamment de toute condition de nationalité. Le
GERFA a critiqué fermement cette ordonnance qui est
manifestement contraire à la Constitution, d’autant
qu’il n’en voyait pas l’utilité depuis
l’assouplissement des conditions d’octroi de la
naturalisation. La Cour d’arbitrage a été saisie du
problème et a préféré ne pas se prononcer
au fond en déclarant le recours irrecevable par défaut
d’intérêt.
Le GERFA continue de penser que l’adoption de cette ordonnance
constitue une faute juridique, indépendamment de la
frilosité de la Cour d’arbitrage, mais également
une faute politique dans la mesure où il ne voit pas pour quelle
raison un habitant qui ne souhaite pas devenir belge ou dont la demande
de naturalisation a été refusée pour des motifs
d’ordre public puisse accéder à
l’administration bruxelloise. Au nom du
« politiquement correct », les parlementaires
bruxellois ont surtout fait preuve de naïveté et de
méconnaissance des règles en vigueur dans une
administration publique.
4. L’administration
Dans le fonctionnement quotidien de son administration, la
Région bruxelloise a fait moins de vagues que ses
consœurs, la Communauté française ou la
Région wallonne ! Il n’empêche qu’un
système de primes particulièrement arbitraire et opaque a
été instauré. Épinglons en particulier les
primes dites d’excellence dont l’attribution très
discrète par le conseil de direction ne peut que susciter la
réprobation. La Région bruxelloise semble oublier que
l’opacité ne va pas de pair avec un système de
carrière et de statut et que les agents ont le droit de
connaitre les heureux bénéficiaires des primes et surtout
les motifs pour lesquels elles ont été attribuées.
5. L’Agence de stationnement
La Région bruxelloise a pris l’initiative de créer
un nouveau machin pour gérer le stationnement sur le territoire
des dix-neuf communes.
Si l’initiative d’organiser le stationnement et d’en
uniformiser les règles en fonction d’objectifs
régionaux est positive, par contre, la création
d’un nouveau machin doit être condamnée,
d’autant que la Région bruxelloise, par le biais de son
administration des Déplacements, aurait pu assumer cette mission.
De plus, cette agence va prélever une dime importante sur les
recettes des communes et entrainera des frais administratifs
significatifs, sans compter évidemment les salaires des deux
fonctionnaires dirigeants (1 F et 1 N !).
En outre, l’agence est créée sous forme d’une
société anonyme de droit public, dont le capital sera
souscrit par la Région à raison de minimum 81% et
facultativement par chaque commune bruxelloise à raison de 1%.
Le choix de cette forme juridique doit être
sévèrement condamnée, là où un
service public organique devait être présent
(ministère ou pararégional). De plus, la soumission de
l’agence au code des sociétés entrainera une
série d’obligations supplémentaires couteuses sans
compter que la transparence comptable ne sera guère au
rendez-vous.
Enfin, en ce qui concerne le recrutement du personnel, aucune
règle n’est imposée dans l’ordonnance de
création même s’il est prévu le recours
à une mobilité optimale de fonctionnaires des
administrations publiques, et on peut craindre que le statut qui sera
établi par la suite par le Gouvernement ne réserve
quelques surprises.
En conclusion, le fameux « modèle
bruxellois » n’est pas en l’état
très convaincant et a surtout permis la multiplication des
mandats et la conclusion d’accords tarabiscotés, souvent
au détriment des règles démocratiques et des
intérêts des habitants de Bruxelles, dont la Région
est au centre et donc l’enjeu de tous les compromis entre
Francophones et Flamands. Par ailleurs, les ministres et parlementaires
manquent manifestement de format et n’ont pas été
capables d’imposer une gestion responsable, prenant en compte la
place de Bruxelles comme région à part entière. Et
pourtant, ce défi doit être relevé sous peine de
voir le statut de la Région constamment renégocié
et affaibli.
1. Un statut et non des contrats
— Le statut établi par la loi ou le règlement
est général et s’applique de manière
identique à tous les agents se trouvant dans la même
situation.
— Tous les citoyens sont égaux devant
l’accès aux emplois publics : le recrutement n’est
tributaire que de la compétence et des capacités,
sanctionnées en principe par la réussite d’un
concours.
— Une fois sa nomination à titre définitif
acquise lorsqu’il a satisfait à un stage dont la
durée est limitée, l’agent a droit à la
stabilité de l’emploi : il ne peut être mis fin
à ses fonctions que dans les cas prévus par le statut,
soit pour des raisons objectives (âge de la retraite,
démission offerte, survenance d’une
incompatibilité), soit par révocation disciplinaire ou
par licenciement pour raison médicale ou d’inaptitude
professionnelle, au terme de procédures réglées et
contradictoires qui permettent à l’agent de faire valoir
ses droits. Il est à noter que même la suppression
d’un service public ou de ses missions en tout ou en partie
n’entraine pas la perte de la qualité de fonctionnaire,
mais sa « mise en disponibilité par suppression
d’emploi » , en principe avec maintien du
traitement et droit à la réaffectation dans un autre
service public.
— L’agent a également un droit à la
carrière (promotion) selon des critères objectifs
(examen, ancienneté, comparaison des titres et
mérites...) et des procédures réglées et
contradictoires en cas de désaccord.
Ces conditions ne sont pas des privilèges, mais des garanties
liées aux lois du service public, en particulier la
continuité, l’universalité et l’accès
égal au service, ce qui nécessite la stabilité des
fonctions ainsi que l’indépendance et
l’impartialité de ceux qui les exercent.
Ces principes sont battus en brèche par le recours massif aux
contractuels et par la décision du Gouvernement wallon de leur
constituer une carrière.
2. Des principes généraux établis sur une base constitutionnelle
Actuellement, le statut des agents est toujours réglé par
le pouvoir exécutif (arrêtés). Il nous semble
fondamental que le statut des agents de la fonction publique
— comme dans la plupart des pays de l’Union
européenne, en Suisse ou aux États-Unis —
fasse l’objet d’un véritable débat
démocratique et soit donc fixé par la loi.
Beaucoup de Constitutions étrangères attribuent non
seulement au législateur cette compétence en
matière de fonction publique, mais édictent souvent
elles-mêmes des règles qui leur paraissent fondamentales.
Devraient être soumis à révision :
— l’article 107, alinéa 2 (« Le Roi
nomme... aux emplois d’administration
générale » ), afin d’y
préciser que les principes du statut des fonctionnaires doivent
être établis par la loi, le décret ou
l’ordonnance.
En effet, l’interprétation actuelle de l’article
107, en faisant dériver de manière illogique le pouvoir
de règlementer du pouvoir de nommer, livre le statut de la
fonction publique à la discrétion du gouvernement, ce qui
crée un climat d’insécurité juridique et
contribue indirectement au fléau de la politisation ;
— l’article 10, dont l’alinéa 2
énonce le principe de l’égal accès des
Belges aux emplois publics ; ce grand principe peut facilement
être bafoué, si deux de ses conditions essentielles : le
recrutement par concours et le caractère statutaire des emplois,
ne sont pas réalisées. Nous souhaitons donc qu’un
alinéa 3 précise que les emplois des administrations
publiques sont pourvus par concours et occupés par des personnes
nommées à titre définitif et soumises à un
statut légal, sauf exceptions établies par la loi.
3. Des statuts établis par la loi, le décret ou l’ordonnance
À défaut d’une loi (fédérale)
applicable à tous les services publics (pouvoirs locaux compris)
qui permettrait de dégager des principes et des droits communs,
notamment l’objectivité du recrutement et la
mobilité, (condition nécessaire d’une
véritable garantie de l’emploi), et éviterait une
inflation règlementaire totalement stérile, le GERFA
préconise au moins :
— une loi fédérale pour les principes du statut de
l’ensemble de la fonction publique fédérale ;
— un statut commun aux agents des services et des personnes
publiques relevant de la compétence de la Communauté
française, de la Région wallonne (y compris les pouvoirs
locaux) et, sinon de la Région bruxelloise, au moins de la
Commission communautaire française, qui garantirait la
mobilité entre eux (accord de coopération soumis à
l’assentiment des assemblées ou, plus
démocratiquement, délégation de la
compétence normative aux parlementaires de la
Communauté) ;
— une concertation, au sein de la Conférence
interministérielle de la Fonction publique, sur les
modalités techniques d’équivalence des grades et
des échelles barémiques entre l’État
fédéral et les Communautés et Régions, si
l’on veut éviter un cloisonnement absolument
étanche.
4. La priorité à l’emploi statutaire
Il s’impose de prohiber les recrutements sous statut
précaire dans les services publics (contractuels et contractuels
subventionnés) et d’abroger les dispositions
légales et règlementaires qui les permettent. Trop
souvent en effet, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, les
autorités administratives privilégient le recrutement
contractuel, ce qui ne manque pas d’interférer dans le
recrutement définitif ultérieur si l’agent
contractuel est lauréat d’un examen.
Il faut donner la priorité aux lauréats des concours
organisés par le Secrétariat permanent de Recrutement
(SELOR) et qui attendent dans les réserves de recrutement.
Pour combler les besoins de personnel, il faut enfin organiser efficacement le système de mobilité.
5. La dépolitisation commence par le sommet
Au cours des dernières années, de nombreux
dysfonctionnements sont apparus dans le recrutement puisque le
système des mandats permet la politisation systématique
de la haute fonction publique communautaire et wallonne.
De la qualité du recrutement dans les services publics
dépend en grande partie la qualité des services qui sont
rendus à l’usager.
Par ailleurs, le recrutement d’agents définitifs engage le
service public dans des termes longs (parfois quarante ans pour un
agent engagé à 25 ans) et pour des sommes importantes
(plus de deux millions d’euros pour un agent de niveau 1).
La procédure de recrutement doit donc permettre la
sélection des candidats les plus compétents et les mieux
adaptés à la fonction tout en respectant le principe
d’égalité, sous peine de ne pouvoir disposer des
ressources humaines indispensables à un fonctionnement efficace.
1. Principe d’égalité : le concours
Seul le concours (qui implique un classement auquel
l’autorité ne peut déroger, contrairement à
l’examen, où elle choisit à son gré parmi
les candidats ayant réussi) ouvert à tous les candidats
réunissant les conditions (règlementaires) prévues
est capable d’atteindre cet objectif.
Cela implique un appel public aux candidats publié au
Moniteur belge
et par les moyens de communication les plus appropriés. Encore
faut-il que ces concours soient organisés sérieusement.
Pour ce faire, il est nécessaire :
— que les concours soient organisés par un organisme
public indépendant de l’autorité administrative qui
recrute ;
— que les jurys de sélection soient composés de
personnes extérieures à l’administration qui
recrute ou en tout cas que les membres de l’administration qui
recrute n’y soient pas majoritaires.
2. Comment sélectionner les plus compétents ?
Une fois acquis le principe de la sélection par concours, il
s’impose que ceux-ci sélectionnent les meilleurs par des
épreuves approfondies. En particulier, le GERFA insiste sur le
fait que les épreuves doivent avoir un contenu précis
permettant de détecter les connaissances et le savoir-faire
correspondant à la fonction à pourvoir ; les
épreuves ou tests psychologiques ne peuvent jouer de rôle
fondamental dans une procédure de recrutement et peuvent tout au
plus servir d’indication générale.
L’ensemble des services publics, donc y compris les communes, les
provinces, l’enseignement, etc., doivent être soumis au
principe de concours et une agence de recrutement pour ces services
publics doit donc être créée.
Cela étant précisé, il est possible que les
politiques, plutôt que d’étendre les
compétences déjà limitées de SELOR (qui
organise les examens de recrutement pour les ministères et
organismes publics fédéraux, communautaires et
régionaux), les restreignent encore et prennent donc une
direction opposée à ce que le GERFA préconise.
C’est d’ailleurs ce qui s’est produit pendant la
dernière législature, puisque le Gouvernement
fédéral a remplacé le système du concours
par le système de l’examen, ce qui a un effet
immanquablement sur les procédures de recrutement dans les
entités fédérées.
Du reste, le GERFA ne manque pas de s'interroger sur la dérive
idéologique et les dysfonctionnements préoccupants de
SELOR.
En cas d’abandon, pour les Régions et les
Communautés, de l’obligation de passer par le SELOR pour
le recrutement des agents définitifs, abandon qui semble
programmé par le nouvel arrêté royal
« fixant » les principes
généraux, le GERFA propose la création, au niveau
de la Communauté française, d’une agence de
recrutement indépendante, compétente pour tous les
pouvoirs publics francophones.
Cette réforme permettrait d’abord aux Francophones de ce
pays de se doter d’un début d’appareil
d’État et donc de renforcer la solidarité entre les
diverses entités francophones en leur faisant partager un
organisme commun et une philosophie de recrutement commune. Par
ailleurs, il s’agit également de donner un signe, de
sortir les Francophones de la politisation ambiante et de faire le pari
d’une Communauté française abandonnant
définitivement ses habitudes de lotissement pour en venir
à un État moderne et véritablement
démocratique, facteur évident d’un renouvellement
de mentalité et moteur d’un redéploiement social et
économique.
Le déficit de formation professionnelle des agents des services
publics est énorme. Malgré les moyens importants qui y
ont été consacrés, on ne peut
s’empêcher de constater qu’on n’est jamais
sorti d’un certain bricolage ambiant, fortement teinté de
tourisme, faute pour l’autorité d’avoir
déterminé ses objectifs et un plan d’action.
Maintenant, la tendance est inversée et on voit se créer
de véritables bureaucraties de formation, lourdes et complexes,
adossées elles-mêmes à de multiples exigences
d’examens ou de tests établis dans le cadre de la
carrière.
La formation des agents, si elle est devenue une préoccupation
constante pour tous ceux qui gèrent des services publics, est
toutefois de plus en plus déconnectée des exigences de
fonctionnement du service public et du service à l’usager.
La multiplication des épreuves pour différentes fonctions
devient donc une fin en soi et donne l’illusion que la promotion
est subordonnée à des critères efficaces, alors
qu’elle ne consiste souvent qu’en parcours du combattant
peu approprié pour sélectionner les plus aptes à
la fonction à pourvoir.
La formation a pour but de donner aux agents les ressources
nécessaires pour assumer efficacement leurs missions ; la
formation doit également rappeler aux agents les règles
essentielles d’un État de droit, qui implique notamment le
respect constant des principes de bonne administration et de bonne foi
dans les relations avec l’usager.
Le GERFA propose donc la création d’une véritable
École d’Administration qui sera chargée
1 ° de la délivrance des brevets dans le cadre du système du BARÈME-PLAN ;
2° de la formation des futurs administrateurs dans le cadre de la CARRIÈRE PROGRAMMÉE ;
3° de la délivrance des brevets de directeur de la formation
(responsable de la formation dans un ministère ou un organisme
public).
À côté de ces missions statutaires,
l’École d’Administration assume également des
missions de coordination ou d’exécution :
1° en matière de préparation aux examens de carrière ;
2° en matière de formation professionnelle.
Le GERFA estime que la formation des fonctionnaires relève de la
compétence des Communautés : il demande dès
lors la création de trois écoles d’administration
(francophone, germanophone et néerlandophone) pour tous les
fonctionnaires fédéraux, régionaux,
communautaires, ainsi que pour ceux des services publics locaux
(communes, provinces, etc.). Par leur capacité de
sélection objective des futurs fonctionnaires
généraux ainsi que par leur capacité à
insuffler une véritable culture de service public, ces
écoles doivent devenir la clé de voute de la
réforme.
Il convient de rappeler que l’« école
d’administration » créée par la
Communauté française ne répond pas aux exigences
émises par le GERFA (établissement indépendant,
ouvert à tous les fonctionnaires francophones, assumant une
politique globale de formation qui implique des programmes
spécifiques adaptés aux besoins de
l’administration), tant sur le plan de son organisation et de son
indépendance que sur le plan de ses compétences. Il
s’agit en effet d’une école
d’administration-croupion, limitée à la seule
Communauté française, déjà dirigée
par un agent politisé, qui se borne a délivrer les
brevets de direction mal construits et peu utiles, aujourd'hui
abandonnés.
Si cette école peut servir de publicité au Gouvernement
de la Communauté française, elle n’est guère
de nature à contribuer à la promotion d’une
nouvelle fonction publique efficace.
1. Au niveau A (niveau 1)
Le GERFA réclame résolument un autre type de
carrière pour les agents publics. En effet, les techniques
anciennes de promotion ne permettaient pas de sélectionner des
hauts fonctionnaires toujours compétents et imposaient à
tous les degrés de la hiérarchie une politisation
intense. Quant au système de mandat dans sa première
phase, il n’a fait que renforcer encore la politisation des hauts
fonctionnaires, tout en augmentant substantiellement leurs
revenus !
Le système de mandat dans une deuxième phase ne pourra
fonctionner correctement s’il n’est pas lié à
l’obtention d’un véritable brevet
décerné par une véritable école
d’administration (voir infra et supra).
Le GERFA propose un nouveau système qui a pour objectif,
d’une part, de dépolitiser les grades moyens (rangs 10 et
13), et, d’autre part, d’imposer aux futurs fonctionnaires
généraux des conditions de compétence minimales.
Pour les grades moyens, le GERFA préconise l’adoption d’une nouvelle technique : le
barème-plan.
Le fonctionnaire ne changerait plus de grade, mais après des
laps de temps déterminés, il changerait
d’échelle barémique.
Ainsi, si l’on se réfère aux dénominations
des grades en usage dans l’administration fédérale,
le fonctionnaire commencerait sa carrière au
barème A11 ; après 4 ans, il passerait au
barème A21 ; après 6 nouvelles années, il
passerait au barème A22 ; après 6 nouvelles
années, au barème A31 et après 6 dernières
années au barème A32, tout en restant à son grade
d’origine (par exemple : attaché).
Il faut noter que cette réforme n’entrainera pas de frais
supplémentaires, puisqu’il suffit de projeter les
proportions actuelles des échelles sur les longueurs des
paramètres de changement d’échelles
barémiques.
Il est évident cependant que cette carrière ne devrait
pas être totalement automatique. Pour pouvoir
bénéficier des différents barèmes,
l’agent devrait réunir une série de conditions
objectives telles que présentation et défense d’un
mémoire, obtention de différents brevets, etc.
Cette réforme a pour conséquences principales de
« départisaner » les fonctionnaires
moyens, de supprimer les systèmes de quotas par parti et de
retourner à des règles simples et automatiques.
Pour les
fonctionnaires généraux (chefs
d’administration ou adjoints de chefs d’administration), le
projet du GERFA a pour but essentiel de concilier compétence et
choix politique. Il est le fait d’un double constat, d’une
part que l’autorité politique veut choisir ses
fonctionnaires généraux, d’autre part qu’il
faut limiter ce choix à des agents compétents.
Il s’impose de créer une réelle carrière
pour les fonctionnaires généraux basée sur trois
axes :
1° un concours ;
2° une période de formation ;
3° des mandats de direction.
Tout agent de niveau A comptant 6 années
d’ancienneté pourrait présenter un concours de
capacité d’un haut niveau d’exigence.
Après ce concours, le lauréat doit suivre une
année de formation organisée en Belgique par
l’École d’Administration. Au terme de cette
année et après réussite d’un examen, le
candidat est revêtu du grade d’administrateur
(barème A31). C’est uniquement parmi les administrateurs
que l’autorité politique peut choisir ses fonctionnaires
généraux pour des mandats limités et
renouvelables, à l’issue desquels ils retrouvent leur
grade d’origine.
Avantages du système :
1 ° le choix est limité à des agents qui ont acquis un minimum de compétence ;
2° par le mécanisme des mandats, les fonctions ne sont pas
monopolisées pour des termes de 20 ans et plus ;
3° une collaboration plus étroite entre les fonctionnaires
dirigeants et l’autorité politique permet une
réduction drastique des effectifs des cabinets
ministériels.
2. Aux niveaux B et C (niveaux 2+ et 2)
Trois principes doivent être respectés dans la réforme de la carrière à ces niveaux.
D’abord, il y a lieu de garantir le passage au niveau
supérieur par un concours d’accession organisé par
le SELOR (ou l'agence indépendante de recrutement appelée
à remplacer celui-ci) et basé sur des matières
utiles à la fonction.
Ensuite, un système de barème-plan doit être
instauré, du barème de base aux barèmes
intermédiaires.
Enfin, un examen « haut de
gamme » permettant l’accès au dernier
grade du niveau (grade de commandement ou de spécialisation)
doit être organisé ; cet examen permettrait de
sélectionner les véritables chefs de bureau dont le
service public a besoin.
3. Aux niveaux D et E (niveaux 3 et 4)
Deux principes doivent être prévus dans la réforme de la carrière à ce niveau.
D’une part, il y a lieu de garantir le passage au niveau
supérieur par un concours d’accession organisé par
le SELOR (ou l'agence indépendante de recrutement
appelée à remplacer celui-ci) et basé sur des
matières utiles à la fonction.
D’autre part, un système de barème-plan doit être instauré pour l’ensemble du niveau.
1. Enseignants de la Communauté
Les enseignants des écoles de la Communauté doivent
être recrutés par voie de concours, organisés par
ou sous le contrôle d’un organisme indépendant,
garantissant une sélection sérieuse et objective et
permettant d’établir un classement des lauréats
auquel le Ministre ne peut déroger ; les nominations
à titre définitif doivent être
accélérées (un délai de deux ans nous
parait un grand maximum).
2. Enseignants des autres écoles publiques
Le recrutement des enseignants des écoles communales et
provinciales devrait être organisé également par
voie de concours et selon les mêmes principes que ceux que nous
proposons pour le recrutement des agents des administrations locales et
régionales.
3. Enseignants des écoles privées
Le paiement par la Communauté de subventions-traitements
à l’enseignement privé devrait impliquer en
contrepartie que les enseignants soient recrutés
également par voie d’examen, qu’ils
bénéficient des mêmes garanties en matière
disciplinaire et de droits de la défense que leurs
collègues de l’enseignement public et que leur
carrière ne puisse être compromise parce qu’ils
exercent des libertés constitutionnelles ou des droits civils et
politiques reconnus à tous.
L’accessibilité du service public doit s’entendre
dans un sens large. L’accueil téléphonique ou dans
les locaux du service concerné est primordial, mais n’en
demeure pas moins une condition minimale de
l’accessibilité si on la considère du point de vue
de l’« égalité
d’accès » . L’accessibilité
commence bien avant le contact direct entre un usager et un service
public quelconque et doit donc s’entendre comme la
possibilité pour l’usager d’être le mieux
servi quels que soient ses horaires de travail, son mode de
déplacement ou sa mobilité.
Dans cet esprit, il convient d’encourager le recours aux
méthodes modernes de transmission des documents sans
déplacement de l’usager et une simplification radicale des
formalités, en parlant du principe que les administrations
doivent, lorsqu’il leur appartient de les établir,
échanger directement entre elles les documents requis pour la
constitution des dossiers au lieu d’astreindre les usagers
à de multiples démarches.
À cet égard, on ne peut dire que les progrès aient
été significatifs. Les administrations régionales
et communautaire continuent à multiplier les demandes et
n’ont guère fait preuve d’interactivité. Par
ailleurs, alors que la plupart des services ont accès au
Registre national, il parait inadmissible que de nombreuses
administrations requièrent encore des copies d’acte de
naissance du demandeur.
1. L’accueil courtois et efficace, un principe de base
Qu’il se rende sur place ou cherche à obtenir un
renseignement par téléphone, l’usager des services
publics est en droit de recevoir un accueil correct et aimable et
d’être orienté efficacement vers le service ad hoc,
le cas échéant.
Cela suppose pour les agents concernés, préposés
à l’accueil et aux renseignements, une formation
appropriée à l’accueil téléphonique,
à la communication et/ou à la gestion des plaintes mais
aussi une bonne information sur les missions des différents
départements, les déménagements de ceux-ci, et ce
afin d’éviter que l’interlocuteur ou le visiteur ne
se retrouve, après un « jeu de
piste » fastidieux, à la case départ...
2. L’adaptation des heures d’ouverture
Pour répondre aux besoins de la population, les services
devraient être accessibles en dehors des heures habituelles de
travail, dans des limites raisonnables et pour autant qu’il
existe une demande réelle des usagers (le samedi matin, par
exemple). Il serait opportun, là où cela ne se fait pas
encore, de prévoir la continuité du service pendant les
heures de table, de midi à deux heures.
3. L’accessibilité des lieux : pour une égalité d’accès
L’administration doit tenir compte de tous les publics auxquels
elle s’adresse. Ainsi, les citoyens ou les usagers doivent
pouvoir s’y rendre facilement via les transports en commun. De la
même façon, les lieux devraient être rendus
accessibles aux personnes à mobilité réduite.
De même, les parcages des services publics doivent être
accessibles aux citoyens qui se rendent dans une administration,
moyennant évidemment demande préalable.
4. Une information accessible et transparente
4.1. L’information sur le recrutement
En 2000, le Gouvernement VERHOFSTADT a supprimé l’Agenda
du S.P.R. qui donnait mensuellement aux candidats à un emploi
dans la fonction publique une information claire et précise
moyennant le paiement d’une somme modique. Désormais, le
candidat à un emploi public est contraint de consulter le site
confus SELOR.be sur lequel il ne trouve pas toujours les informations
utiles et surtout le programme des épreuves. Cet agenda du
S.P.R. ne coutait pas très cher et représentait un
instrument d’information efficace et fiable. Le GERFA propose
donc de rétablir cet outil, éventuellement sous une forme
électronique, en améliorant toutefois les informations
qui y sont contenues (notamment sur le programme des examens) mais
surtout en étendant son champ d’information à tous
les services publics. Ainsi, à l’instar de ce qui se fait
dans d’autres pays, les citoyens candidats à un emploi
public disposeront directement de toutes les informations utiles sur
tous les recrutements envisagés dans le service public. Il est
bien évident que le rétablissement de l’Agenda
n’implique nullement la suppression du site de SELOR qui doit au
contraire être amélioré.
À défaut d’obtenir le rétablissement de
l’agenda pour l’ensemble de la fonction publique, le GERFA
réclame l’édition d’un instrument
équivalent pour les entités fédérées
francophones et l’administration bruxelloise.
4.2. L’information légale
Par les articles 472 à 478 de la
loi programme (l) du 24 décembre 2002, la diffusion du
Moniteur sur papier a été supprimée et les citoyens sont priés de consulter le site Internet du
Moniteur belge.
Toutefois, l’édition papier ne disparait pas tout à
fait puisque trois exemplaires sont toujours imprimés et sont
déposés respectivement à la Bibliothèque
royale dans le cadre de la loi du 8 avril 1965 instituant le
dépôt légal, au ministère de la Justice et
au siège du
Moniteur.
Désormais, les citoyens ne sont plus placés sur un
même pied et leurs possibilités de consultation et
l’efficacité de celle-ci dépendront grandement de
leurs moyens informatiques et donc de leur situation financière
et sociale.
On peut se demander également si la publication des lois et règlements sur le site Internet du
Moniteur
est suffisante pour considérer qu’elle entraine dans les
dix jours, sauf disposition contraire, leur entrée en vigueur,
puisqu’elle nécessite un équipement informatique
lourd, une connexion à débit rapide et qu’elle ne
permet pas, à première vue, de prendre connaissance
facilement et rapidement de l’ensemble des textes repris sur le
site.
Dans la mesure où le
Moniteur
publie également les textes règlementaires des
Régions et des Communautés, l’État
fédéral a porté atteinte à leurs
prérogatives et devait au minimum requérir leur avis
avant de modifier le mode de publication des décrets,
ordonnances et arrêtés régionaux et communautaires.
En décidant la suppression du
Moniteur
papier, le Parlement fédéral a manifestement pris une
décision légère et inconséquente qui
fragilise l’État de droit. En effet, la décision
prise viole le principe d’égalité des usagers et
les exigences minimales requises pour la connaissance de la loi, de
même que les règles répartitrices de
compétence, tout en sous-estimant les risques de fraude et de
mainmise sur le système
Compte tenu des éléments développés
ci-dessus, le GERFA réclame donc le rétablissement de la
version papier du
Moniteur qui coexistera avec la version électronique diffusée sur l’Internet.
À défaut, le GERFA réclame la publication
d’un journal officiel francophone pour les textes
réglementaires des Régions, de la Communauté et de
la Commission communautaire française.
Afin de restaurer la confiance entre l’autorité et le citoyen, il s’impose de renforcer plusieurs normes.
1. Des actes administratifs motivés
Certes, la loi du 29 juillet 1991 impose que les actes soient
motivés en fait et en droit. Cette exigence légale doit
cependant être mieux suivie dans son esprit. En particulier, les
motivations automatiques ou non adéquates doivent être
prohibées, de telle façon que le citoyen destinataire de
l’acte connaisse directement ses motifs réels.
2. Le respect de la publicité
Si l’article 32 de la Constitution a établi le principe de
la publicité des actes administratifs, il en a malheureusement
délégué l’exécution à
l’État fédéral et aux entités
fédérées. Le citoyen se trouve donc
confronté à une difficulté majeure : quelle est la
loi, le décret ou l’ordonnance qui est applicable à
sa demande de publicité ? Il ne faut pas que la
publicité, qui constitue une avancée pour les droits des
citoyens, se mue en piège juridique et qu’il faille
consulter des juristes pour connaitre le droit applicable et la
procédure à suivre pour l’obtention d’un acte
administratif.
Il s’impose donc, qu’à l’instar de la
motivation, un régime unique de publicité soit
établi qui concerne l’ensemble des actes administratifs
des autorités administratives et qu’une seule commission
(mais deux sections linguistiques) d’accès aux documents
administratifs soit compétente en cas de litige.
Enfin, cette commission doit disposer d’un pouvoir de
décision (et non d’un simple pouvoir d’avis) et
pouvoir ordonner à l’autorité administrative la
communication des pièces demandées.
Notons à cet égard qu’il y a lieu de donner les
moyens suffisants à cette commission pour qu’elle puisse
rendre ses avis (ses décisions) à bref délai, sous
peine de rendre sa saisine inutile.
Le principe de publicité, pour ne pas être une obligation purement formelle, a pour corolaires :
— l’accessibilité réelle à
l’information sans formalités ni cout dissuasifs, la
lisibilité des documents ;
— l’information claire et complète des usagers
sur leurs droits et les voies de recours et de réclamation qui
leur sont ouvertes.
1. Le référendum
Il faudrait régler son compte au postulat idéologique de
l’article 33 de la Constitution, qui accorde implicitement
à la représentation parlementaire le monopole de
l’exercice de la souveraineté : le véritable
Souverain, c’est le(s) peuple(s), qui doit pouvoir se prononcer
tant directement par le référendum,
qu’indirectement par l’élection de ses
représentants ; la présomption selon laquelle la
représentation exprime de manière infaillible la
volonté générale est parfois contraire aux faits.
L’institution du référendum de décision est
devenue indispensable si l’on veut éviter un divorce
croissant entre les responsables politiques et les citoyens, donc des
dérives dangereuses pour la démocratie et les
libertés : elle doit être préalable à
toute nouvelle remise en question des structures institutionnelles.
Si le référendum aux niveaux local et régional est
assez généralement prôné, les
réactions de l’opinion publique aux dernières
réformes de l’État et les débats sur le
traité de Maastricht dans plusieurs pays européens
montrent qu’il faut aller plus loin.
En effet, le référendum n’est pas incompatible avec
le fédéralisme pourvu qu’il soit
aménagé : en Suisse, une initiative populaire
n’est adoptée que si elle obtient la majorité
à la fois dans l’ensemble du pays et dans plus de la
moitié des États fédérés
(cantons) ; en Belgique, on pourrait exiger la majorité
dans chacune des trois Régions. Ceci ne concerne pas les
scrutins à organiser pour fixer les limites des Régions :
ici, c’est, en saine démocratie, aux habitants des
communes et quartiers concernés et à eux seuls de se
prononcer.
En conclusion, le GERFA considère que devant la gravité
de la crise de la représentation politique que connait ce pays,
l’institution du référendum, sans cesse
différée, doit maintenant avoir la priorité sur
toute autre réforme institutionnelle et que devraient
dorénavant être soumis à la ratification
populaire :
1° les modifications de la Constitution et des lois
spéciales de réforme de l’État, ce qui
répond par ailleurs aux objections relatives à
l’obsolescence de l’actuelle procédure de
révision constitutionnelle ;
2° les traités visant à élargir l’Union
européenne ou à en modifier les institutions ;
3° les lois civiles et pénales qui règlent les
problèmes communément qualifiés
d’« éthiques » et qui ont pour
enjeu le statut et les droits fondamentaux des personnes.
2. Une véritable Cour constitutionnelle
Le GERFA opte clairement pour la création d’une Cour
constitutionnelle, au-delà de l’élargissement des
compétences de la Cour d’arbitrage au contrôle du
respect des droits énoncés au titre II et des
dispositions fiscales de la Constitution.
Une véritable Cour constitutionnelle doit :
— avoir une compétence générale en
matière de contrôle de constitutionnalité des lois
et décrets, et donc être aussi la gardienne du respect des
règles démocratiques (par exemple, en matière de
délégations du pouvoir législatif par des
lois-cadres ou de pouvoirs spéciaux, ou de conformité des
traités internationaux à la Constitution avant leur
ratification) ;
— être investie du contrôle de
régularité des élections législatives et de
la vérification des pouvoirs des membres des assemblées
parlementaires, nul ne devant être juge en sa propre cause ;
— être composée exclusivement de magistrats
professionnels, issus de préférence de la Cour de
cassation et du Conseil d’État. La jurisprudence de la
Cour d’arbitrage, qui considère que le fait, pour un de
ses membres, d’avoir pris part antérieurement au vote
d’une loi déférée à sa censure, ne
constitue pas en soi une cause de récusation, ne peut que
renforcer le bien-fondé de cette exigence.
Il faudra par contre veiller à endiguer le recours aux questions
préjudicielles, voire remettre ce mécanisme en question,
car certains plaideurs en abusent manifestement pour empêcher que
justice soit rendue dans des délais raisonnables et accroitre le
cout des procès.
3. Les juridictions administratives
La prise de conscience par le citoyen de ses droits a entrainé
une augmentation du volume du contentieux administratif qui se trouve
dès lors confronté à un double défi :
— absorber et régler une masse de litiges toujours plus importante ;
— rendre la justice dans un délai raisonnable.
Le contentieux administratif est émietté entre,
d’une part, une série d’organes juridictionnels
souvent peu connus et peu accessibles (députation permanente,
commissions diverses), et dont l’impartialité n’est
pas toujours garantie, et, d’autre part, le Conseil
d’État. Enfin, il faut regretter que le Conseil
d’État devient de plus en plus lent et ne garantit plus au
citoyen le droit de voir son affaire jugée dans un délai
raisonnable.
Pour résoudre ces différents problèmes, le GERFA
propose la création d’un système cohérent de
juridictions administratives.
Afin de réduire l’encombrement du Conseil
d’État, il propose de limiter sa compétence de
juridiction aux actes règlementaires émanant des
autorités administratives fédérales,
communautaires et régionales et aux recours en cassation
dirigés contre les décisions des juridictions
administratives du 1er degré.
Par ailleurs, il propose la création de juridictions
administratives du 1er degré (une par province)
compétentes en matière de recours contre les actes
individuels et contre les actes règlementaires des
autorités locales, à l’exception des litiges
relatifs aux communes à statut spécial, qui doivent
relever de chambres bilingues du Conseil d’État.
Cette réforme devrait avoir des effets importants sur la gestion
du contentieux, mais ne permettra pas d’éviter à
terme un renforcement des moyens du Conseil d’État.
Ce dernier devra faire l’objet d’un audit sérieux
pour remédier à des défauts manifestes
d’organisation. Par ailleurs, la loi devra lui imposer des
délais précis pour traiter les affaires : en particulier,
un délai devra être prévu pour le
dépôt du rapport de l’auditeur de même que
pour la communication des arrêts, après que les
débats ont été déclarés clos.
La création des tribunaux administratifs ne représente
cependant pas la panacée et l’arriéré
n’est pas le seul mal dont souffre le Conseil
d’État. Alors que le pouvoir judiciaire a fait
l’objet d’une réforme profonde pour objectiver les
nominations de magistrats, le même travail n’est même
pas amorcé en ce qui concerne le Conseil et il parait aller de
soi que les magistrats du siège soient tous politisés
sans que personne ne semble s’en émouvoir.
La aussi, un travail doit être fait pour dépolitiser les
nominations au Conseil d’État et la piste suivie par le
pouvoir judiciaire mérite surement d’être
analysée. Certains rétorqueront que la politisation des
magistrats n’a pas d’influence sur leur façon de
juger. Si, pour la plupart, ce principe est vrai, d’autres jugent
parfois politiquement, surtout quand l’intérêt de
leurs protecteurs est en jeu ou quand le requérant
déplait.
L’auditorat n’est pas non plus sans tache. Même si
ses membres sont recrutés par concours, on peut
s’étonner que ce soit le Conseil d’État
lui-même qui organise seul les épreuves et que les
magistrats politisés jouent donc un rôle important dans la
sélection des candidats. La aussi, il y a matière
à réfléchir et il serait souhaitable
d’associer des experts extérieurs à
l’organisation du concours.
Si l’objectif poursuivi par les décideurs politiques est
bien d’apporter des changements conséquents au
fonctionnement du système dans sa logique actuelle, il est
difficile d’imaginer que l’on puisse y parvenir en faisant
l’économie d’une refonte de la fonction
administrative en vue de la dépolitisation de ses rouages. La
réforme préconisée par le GERFA est donc un
élément capital, sinon le véritable levier du
changement.
La politisation des administrations est dénonçable non
seulement parce qu’elle est contraire au principe
d’égalité, mais aussi parce qu’elle est
à l’origine de perturbations qui ont pour effet pervers de
desservir plutôt que de servir les citoyens dans leurs rapports
avec la fonction publique.
Qu’il soit envisagé en sa qualité d’usager
des services publics, d’employé de la fonction publique,
ou encore de contribuable, aucun citoyen ne profite sur tous les plans
du système parallèle en vigueur. Tout interlocuteur des
acteurs publics ne peut en effet retirer qu’un
bénéfice illusoire et limité de rapports
privilégiés qu’il entretiendrait avec eux comme
« client ».
Les interactions entre les deux pôles que sont la fonction
publique et le monde politique peuvent prendre de multiples formes.
Dans un tel système, la « gestion des ressources
humaines » est la plupart du temps basée sur des
considérations liées au pouvoir et non
nécessairement liées aux compétences des individus
ou à leur mérite. Aucun poste stratégique, par
exemple, ne se voit confié à un agent qui en aurait les
compétences sans en avoir en même temps le
« droit politique » . Les motivations qui
président à l’engagement, la promotion ou tout
autre aspect de la gestion du personnel conduisent dès lors
à des organigrammes dénués de sens et de
pragmatisme. Les avatars de la dernière réforme sont
à cet égard révélateurs.
Cette incohérence interne trouve son pendant à
l’échelle du vaste organigramme de la fonction publique,
dans le manque de coordination entre institutions, parastataux,
ministères, et autres instances publiques. Nombre de
regroupements ou éclatements de services, départements ou
ministères ont bien souvent pour toile de fond des conflits
d’intérêts ou de compétences imperceptibles
pour le profane. Il arrive par exemple que des dispositifs entiers
soient mis en place dans le seul but d’en contrecarrer
d’autres qui ont bien sûr les mêmes missions.
Ce ne sont pas les seuls exemples de gaspillage de ressources. En
effet, dans la mesure où la logique partisane domine un
système qui par ailleurs est soumis à des obligations et
au respect de procédures, elle oblige les agents de la fonction
publique, qu’elle soumet à sa volonté, à
consacrer une part parfois considérable des ressources dont ils
disposent à la couverture de leurs agissements.
La temporalité propre à chacun des deux pôles
susmentionnés constitue un autre élément de
déstabilisation des administrations. D’une part, la
gestion du temps au sein des administrations, rythmée par les
urgences politiques clientélistes ou autres, peut empêcher
à certains moments toute planification même à moyen
terme. D’autre part, la période préparatoire aux
élections, qui dure en vérité au moins un an,
correspond à un « gel » de certaines
administrations qui sont le point de chute des cabinets
ministériels, les places bloquées ne faisant pas
l’objet de remplacements comme il se devrait.
Ainsi, certaines administrations hautement stratégiques sont
véritablement en état de siège. Elles sont le lieu
de combats décidés, délibérés,
marchandés, ailleurs, sous le nom propre de négociations,
par les stratèges que sont les membres des cabinets
ministériels. Elles apparaissent alors comme
« décentrées » , car
dépossédées des moyens et du pouvoir qui leur
permettraient de remplir leurs missions initiales, elles tournent sur
elles-mêmes sans plus beaucoup de contacts avec la
réalité qui les entoure.
Il est paradoxal que l’organisation des administrations soit
basée, et leurs priorités établies, en fonction
d’impératifs qui sont la plupart du temps étrangers
à la volonté de service au public et de satisfaction du
citoyen. Cette intrusion du politique dans la vie administrative se
fait souvent au nom du principe qui veut que la fin justifie les
moyens. Mais de quelle
« fin » s’agit-il, quand on sait que
les « moyens » représentent un tel
cout pour la communauté en termes de manque à gagner au
niveau du service à la population mais aussi de gaspillage des
ressources provenant du contribuable ?
Que l’action de l’administration publique soit
étroitement soumise au contrôle du pouvoir politique est
normal dans un État démocratique, où le pouvoir
est en principe exercé par les représentants élus
du peuple et non par des technocrates. L’administration doit
appliquer avec loyauté et dans le respect des lois les
décisions prises par les exécutifs, dont elle constitue
en quelque sorte le « bras armé » .
Toutefois, ce contrôle démocratique ne peut
s’exercer efficacement s’il y a confusion entre les
pouvoirs. Or, telle est bien la situation actuelle. En plaçant
leurs affidés à tous les niveaux des services publics,
les partis politiques ont fait de la fonction administrative leur
chasse gardée. Ils ont ainsi contribué à mettre en
place un système où la ligne de démarcation entre
le politique et l’administratif est devenue de moins en moins
visible, se qui, paradoxalement, rend en fait illusoire le
contrôle du second par le premier. Le fonctionnaire dit
« politisé » , devrait plutôt
être qualifié de « politicien
fonctionnarisé » qui, à titre bien
sûr officieux, occupe au nom de sa formation politique un emploi
public, souvent à titre définitif.
Outre son déficit démocratique, la confusion entre les
sphères politique et administrative a un autre effet pervers :
elle compromet gravement le rôle de conseil et d’assistance
que l’administration doit jouer auprès du pouvoir
politique dans la réalisation de ses objectifs. Cette mission
d’expertise devient en effet problématique à partir
du moment où les chefs d’administration agissent
eux-mêmes en
« politiques » plutôt qu’en
techniciens.
Le citoyen-électeur-contribuable est dès lors
confronté à un système politico-administratif sur
lequel il n’a plus guère de prise et que les Gouvernements
régionaux et communautaire ont considérablement
renforcé en désignant à la tête des
administrations régionales et communautaire des mandataires
hyperpolitisés et en recrutant des milliers de contractuels.
Les réformes proposées par le GERFA ne visent donc pas
uniquement à améliorer le fonctionnement de
l’administration au sens strict.
Leur enjeu est beaucoup plus fondamental : l’exercice de la démocratie elle-même.